Musique

QW4RTZ cherche sa voix dans des univers parallèles

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Nancy Caouette

Si les membres du collectif QW4RTZ avaient emprunté un autre chemin dans la vie, qui seraient-ils aujourd’hui? C’est la question à laquelle tente de répondre — avec une bonne dose d’humour absurde — ce quatuor d’harmonies vocales dans leur nouveau spectacle A Capella Heroes. Le groupe amorce justement sa tournée dans l’Est du Québec le 8 février. Rencontre avec l’un de ses membres, le ténor François Pothier Bouchard. 

LES AFFLUENCES : QW4RTZ existe depuis maintenant 10 ans. On vous connaît pour vos reprises a cappella de grands classiques pop. Pour la première fois, vous présentez dans ce spectacle quatre chansons originales. D’où vous est venue cette idée? 

FPB : Durant la pandémie, on a fait un album de Noël dans lequel on a inséré quatre chansons originales. Le résultat était particulièrement niaiseux, mais ça nous a convaincus qu’on n’était pas si pire pour écrire des chansons niaiseuses. On voulait, dans ce nouveau spectacle, tourner autour de chansons originales. 

Puis en discutant avec Serge Postigo, notre metteur en scène, on s’est dit que ce serait le fun d’explorer les univers parallèles qui sont à la mode avec les films de Marvel. Il y a la série What If, qu’on peut traduire par « Et si? », où l’on se demande ce qui serait advenu de notre vie si on avait fait autre chose ou si tel événement s’était passé autrement. C’est la prémisse du spectacle. 

 

LES AFFLUENCES : Et donc vous plongez tête première dans le monde du fantastique avec A Cappella Heroes… mais avec des titres comme Ma belle selle brune ou On est fâchés (on est pas contents), on s’entend que l’humour absurde n’est pas très loin… 

FPB : Ça ressemble à nos spectacles habituels : il y a des chansons drôles, d’autres, plus touchantes, et des sketchs aussi. Mais on a bâti notre trame narrative autour de nos chansons originales. 

Par exemple, il y a des capsules vidéo où Serge Postigo interviewe dans un français un peu hautain les « vrais » nous et les nous qui proviennent d’univers parallèles. Ça sert d’introduction à nos chansons originales. Et les chansons qu’on reprend viennent aussi construire une histoire durant le spectacle. Pour ceux qui veulent écouter l’album du spectacle, je leur dirais qu’il faut vraiment aller voir le show pour comprendre l’album. 

 

LES AFFLUENCES : Peux-tu me donner des exemples de ce qui se produit dans ces fameux univers parallèles? 

FPB : Par exemple, on s’est demandé qu’est-ce qui serait arrivé si Fa2, qui est chauve, avait eu une vraiment belle chevelure dans la vie. On s’est dit qu’il serait sûrement devenu le leader d’un groupe de métal. Ç’a été le prétexte pour faire une chanson métal, ou plutôt un pastiche de chanson métal. 

Pour Louis-Alexandre, qu’est-ce qui serait arrivé s’il était resté chez ses parents? Il est parti de chez ses parents assez tôt, mais c’était vraiment un gamer dans la vie. On l’a imaginé comme une espèce de Tanguy, athlète international de jeux vidéo, dans un sous-sol chez ses parents. Ça nous a fait faire une chanson un peu électro-rétro-futuriste. 

 

LES AFFLUENCES : Ces compositions d’humour absurde vous ont permis d’explorer de nouveaux genres musicaux. On sort de la pop! 

FPB : Oui, et on a eu beaucoup de plaisir à faire d’autres styles de musique. On touche au New Age, à l’électro, au métal et au country. Il faut savoir qu’on est tous des musiciens classiques à la base et qu’on connaît bien la technique. On est capable d’analyser un style ; d’analyser les recettes toutes faites du style pour les reproduire et les pasticher. Et c’est ce qu’on a fait. 

Par exemple, les signatures du style métal, on les a toutes mises dans notre chanson. C’est exagéré, ce n’est pas de la grande chanson, mais on en est très conscients. C’est vraiment une espèce de sketch musical. Mais tout part d’histoires vraies, donc c’est quand même l’un des spectacles où l’on se dévoile le plus aux spectateurs. 

 

LES AFFLUENCES : En plus de votre humour absurde, vous êtes  reconnus pour faire vivre des émotions en montagnes russes au public. On peut rire aux larmes… mais aussi pleurer à chaudes larmes. Aurais-tu un exemple des pièces plus touchantes qui ponctuent ce spectacle de 2 h 30?

FPB : On reprend, par exemple, Tous les cris, les S.O.S., mais on l’a campée dans le contexte actuel de la guerre en Europe, sans toutefois la nommer. On amène ce numéro-là très sobrement, avec Fa2 qui raconte que son petit garçon de cinq ans lui a dit un peu naïvement en regardant les nouvelles : « Papa, est-ce que nous autres, notre maison va être détruite par la guerre? ». 

Ç’a lui est rentré dedans et ça nous a donné l’idée de faire la chanson avec un chœur d’enfants qui vient chanter avec nous par moment avec des projections. Je me concentre pour ne pas trop tomber dans les émotions durant cette chanson, parce que c’est très poignant. 

 

LES AFFLUENCES : Bien que dure, cette chanson-là est de votre génération aussi! Est-ce que tu dirais que le spectacle s’adresse plus à des gens nés dans les années 1980, 1990? 

FPB : Je pense que notre humour est très de notre génération, mais le spectacle est vraiment pour les 7 à 77 ans. Ça m’étonne encore, en fait, mais on est vraiment capable de faire des shows dans les écoles primaires et dans les résidences pour personnes âgées. Évidemment, on adapte ce qu’on fait à notre auditoire, mais tout le monde capote. Il y a des enfants qui veulent des autographes ou prendre des photos. Puis à Noël, on a fait notre show dans un foyer pour personnes âgées et c’était le même genre de réaction. 

Les spectateurs nous disent qu’ils ressentent toutes sortes d’émotions, peu importe l’âge. C’est un peu notre signature. On a toujours fait ça, passer d’un numéro particulièrement niaiseux à l’Hallelujah de Leonard Cohen. Je pense que la voix humaine, l’a cappella, permet ça. C’est vraiment une autoroute vers les émotions plus que les instruments, je pense!