Flots, tout ce qui brille voit : du grand théâtre pour les tout-petits

Sur la scène, un gaillard barbu appelé l’Homme-Qui-Parle (Guy-Daniel Tremblay) pétrit de ses doigts charnus de fins grains de sable. À côté de lui, un jeune moussaillon surnommé l’Homme-Qui-Chante (Josué Bocage) l’observe, attentif, avant de s’exclamer : « Fais-moi la mer! ». Son acolyte s’exécute aussitôt. Il étire son bras pour mettre la main sur une bouteille de verre bleue. Délicatement, il extirpe un foulard bleuté qu’il dispose sur la table illuminée à côté du sable soyeux ainsi transformé en plage. « Les flots ! », clame d’une voix grave, mais rassurante et fière, l’Homme-Qui-Parle. De petits éclats de voix émergent dans la foule : « Oh! de l’eau ! ». La table est mise pour que la magie opère.

Avec Flots, tout ce qui brille voit, le public âgé de 18 mois à 45 ans est, pour une rare fois, sur la même longueur d’onde. « On replonge tous vers quelque chose de primitif, vers la création du monde, vers l’inconnu. On le fait en toute simplicité, avec une certaine naïveté qui crée une belle poésie accessible à tous », résume celle qui a été la première directrice artistique de cette pièce créée en 2012, Hélène Blanchard. 

Cette œuvre de peu de mots qui allie théâtre, musique et art visuel et immersif a eu un immense succès et s’est rapidement transformée en un succès international. « On l’a traduite en anglais, en espagnol, en portugais et en mandarin. Et je vous dirais que les enfants, qu’ils viennent de Pékin ou de São Paulo, ils se ressemblent tous. Ils sont attentifs et émus. Il faut le voir pour comprendre », lance avec enthousiasme Hélène Blanchard. 

Elle ajoute que la pièce parle un langage universel, soit celui des émotions et des sensations. « Certains parents disent “oh! regarde, c’est un oiseau!”, mais on n’est pas vraiment là-dedans… On est plutôt dans les émotions. Grâce à la délicatesse, la finesse et la grande sensibilité du texte et de la mise en scène de Véronique Côté, combinées à la musique de Josué Bocage et à la scénographie d’Érica Schmitz, on arrive à envelopper le spectateur dans un cocon douillet et serein. Un peu comme une bulle protectrice », précise celle qui a cofondé il y a maintenant plus de 45 ans le Théâtre des Confettis à Québec. 

Cette compagnie pionnière du théâtre jeunesse a eu l’audace, dès ses débuts en 1977, de se dédier à un public méconnu et peu courtisé à l’époque, soit les 0 à 5 ans. « Il n’y avait pratiquement rien pour les tout-petits à l’époque et j’étais sceptique quant à leur capacité d’attention. Mais avec Flots, tout ce qui brille voit, j’ai vu des enfants complètement médusés… et des enfants — et des adultes aussi — pleurer parce qu’ils étaient émus », dit-elle avec fierté. 

Qu’est-ce qui fait le succès de la pièce? « C’est difficile à dire », répond Hélène Blanchard. « On constate que la thématique de la mer, de l’attente et de l’imaginaire, ça marche… Les éléments comme l’eau et le vent, ça fonctionne bien chez les tout-petits, car c’est primitif et intuitif. Chez les adultes, ça évoque des souvenirs. On peut jouer auprès des enfants qui ne connaissent pas la mer et pourtant, ça marche très bien. On ne sait pas trop pourquoi, c’est mystérieux, mais on adore ça! » 

Flots, tout ce qui brille voit avait largué les amarres il y a quelques années au port de Québec pour se produire dans l’Est du Québec. C’est donc une deuxième tournée pour Guy-Daniel Tremblay, Josué Bocage et Frédéric Brunet, les interprètes de la pièce, mais cette fois-ci avec des escales inédites, nous explique Hélène Blanchard. « C’est la première fois qu’on joue aux Îles-de-la-Madeleine et on en est vraiment ravis. Car, pour nous, c’est important d’être accessibles à tous. Ce n’est pas parce que vous habitez loin que vous devez être privés de ces spectacles! » 

Moussaillons, laissez vos préoccupations d’adulte à la maison et laissez-vous porter avec vos tout-petits au cœur de ce voyage poétique. Vous en ressortirez des rêves plein la tête… et des étoiles de mer dans les yeux!